Passons maintenant au vif du sujet, pour voir comment se déroulait concrètement une manoeuvre à simple action :
DÉVELOPPEMENT DE LA
MANOEUVRE
Directeur. Quelle
est la situation de votre cavalerie à 6h30 ?
Commandant de la
cavalerie. Le gros (3 escadrons et 1 batterie) sort de
Saint-Jure. L'avant-garde (1 escadron) traverse Raucourt. Un
escadron, qui va chercher la liaison avec la droite de l'armée,
entre à Ressaincourt, pour se porter de là sur Mailly et
Thézey-Saint-Martin. Un peloton, flanqueur de droite, est à 2
kilomètres nord d'Éply. Une reconnaissance d'officier (1 officier,1
sous-officier, 6 cavaliers), précédant le gros sur l'axe Nomeny,
Leyr, va atteindre Nomeny.
D. En abordant
Nomeny, la reconnaissance d'officier est accueillie par des coups de
fusil que fait-elle ?
Ct de la cavalerie.
Elle laisse le sous-officier et deux cavaliers en observation, envoie
un cavalier avertir le commandant du gros de la cavalerie de la
présence de l'ennemi à Nomeny, et cherche à poursuivre sa mission
dans la direction de Leyr, en passant par Abaucourt.
D. Votre
reconnaissance peut passer la Seille à Abaucourt. Mais, à 6h40, la
patrouille laissée en observation devant Nomeny doit se retirer
devant des fractions de cavalerie, qu'elle apprécie à la valeur
d'un escadron au moins.
Ct de la cavalerie.
La patrouille en question va rester au contact. L'escadron
d'avant-garde a appris la présence de l'ennemi à Nomeny, au moment
où il sortait de Raucourt il continue à s'avancer sur Nomeny, en
procédant par bonds, de crête en crête, précédé par un peloton
en fourrageurs.
D. -Arrivé à la
crête jalonnée par le chemin de terre Rouves, Mailly, le peloton
d'avant-garde de votre escadron est en butte à des coups de fusil
venant du mamelon 1 kilomètre nord de Nomeny. Que fait l'escadron ?
Ct de la cavalerie.
Deux pelotons mettent pied à terre, pour prendre sous leur feu les
fractions ennemies qui se montreraient sur la crête en face d'eux,
ou chercheraient à en déboucher. Des patrouilles de combat sont
poussées vers Nomeny, par la droite et par la gauche du mamelon d'où
partent des coups de fusil.
D. Il est environ
6h5o. Où est, de sa personne, le commandant de la cavalerie et que
fait-il ?
Ct de la cavalerie.
Entendant la fusillade au moment où il sortait de Raucourt, il a
franchi la coupure du ruisseau de Pompey, et s'est porté à la crête
puis, voyant son escadron d'avant-garde arrêté, il a galopé à
lui, en donnant ordre aux escadrons du gros de déboîté de la route
et de se masser à l'abri de la crête, à l'est de la cote 212, et à
l'artillerie de se mettre en batterie sur cette crête.
D. Arrivé auprès
de votre escadron d'avant-garde, vous constatez son impuissance à
gagner du terrain vers Nomeny. D'autre part, votre peloton flanqueur
de droite est, lui aussi, accueilli à coups de fusil en abordant
Rouves. Quant à l'escadron opérant sur votre gauche, il a atteint
Mailly sans rencontrer l'ennemi. Quelle résolution prenez-vous ?
Ct de la cavalerie.
J'attaque avec toutes mes forces disponibles, dans le but de
reconnaître l'ennemi, et de l'obliger, si possible, à repasser la
Seille. Si je ne puis m'établir sur cette rivière, et m'y maintenir
jusqu'à l'arrivée de l'infanterie, je chercherai à occuper et à
tenir, devant l'adversaire, des points d'appui à la façon d'une
avant-garde; s'il pousse de l'avant, je manœuvrerai pour exercer sur
lui une action retardatrice.
D. Comment
attaquez-vous ?
Ct de la cavalerie.
Deux escadrons et demi sont appelés dans la dépression qui est au
nord du chemin de terre Rouves, Mailly; gagnant de là les pentes
ouest du ravin qui descend de Mailly vers Nomeny, ils se portent à
l'attaque des forces qui tiennent le mamelon 1 kilomètre nord de
cette dernière localité, en abordant ce mamelon par l'est. En même
temps, l'escadron d'avant-garde se porte en avant dans la direction
nord-sud, et la batterie, escortée par un peloton, vient s'établir
à l'est de la grande route, à hauteur du chemin de terre Rouves,
Mailly, pour appuyer l'attaque.
L'escadron
que j'avais détaché à gauche, a entendu, en arrivant à Mailly,
une fusillade nourrie vers Nomeny le capitaine qui le commande a
alors fait marquer l'occupation de Mailly par un peloton pied à
terre; puis, laissant filer seulement sur Thézey-Saint-Martin une
reconnaissance d'officier pour chercher la liaison avec l'armée, il
s'est dirigé vers Nomeny. Je suppose qu'il a pu intervenir dans
l'action de cavalerie qui se déroule au nord de ce point.
Quant
au peloton flanqueur de droite, après avoir tâté Rouves, il s'est
porté en observation des ponts, de Port-sur-Seille à Clémery.
D. Votre attaque a
obligé l'ennemi a évacué le mamelon au nord de Nomeny; mais, au
moment où vous atteignez la crête de ce mamelon, vous êtes
accueilli par des feux partant de la lisière nord de Nomeny, des
fossés de la route Nomeny, Rouves, et du village de Rouves. Le
mamelon conquis était tenu par la valeur d'un escadron pied à
terre. Vous avez vu, en outre, deux escadrons environ se replier par
la coulée au sud, et disparaître. Vous apercevez des fractions
d'infanterie sur les lisières et aux abords de Nomeny. Il est 7h15.
Des coups de canon partent du plateau de la ferme Laborde et tombent
devant vous, sur les pentes sud du mamelon.
Ct de la cavalerie.
Mon rôle de reconnaissance sur Nomeny est terminé. Impossible de
pousser de l'avant. Mais l'ennemi n'a pas les débouchés du pont de
Nomeny. Je vais les lui disputer : cela le retardera d'autant. En
outre, je déploierai la plus grande activité offensive, dans la
limite de mes moyens, afin de l'inviter à la circonspection.
A
cet effet un escadron pied à terre tiendra le mamelon conquis un
escadron cherchera à s'établir à Rouves.
La
batterie se scindera en deux;
Une
section restant sur l'emplacement occupé présentement, pour appuyer
l'attaque de Rouves, ou recueillir les défenseurs du mamelon;
Une
section ira au château de Mailly, pour tenir sous son feu le pont de
Nomeny et le terrain à l'est de la grande route;
Un
peloton auprès de chaque section d'artillerie;
Deux escadrons à ma
disposition, à 1200 mètres nord-est de Rouves.
D. L'escadron
envoyé sur Rouves ne peut y pénétrer.
Ct de la cavalerie.
II attaque la lisière est de la localité, trois pelotons combattant
à pied. L'artillerie l'appuie de son feu.
D. Cette attaque
est immobilisée à 4oo mètres de la lisière.
Ct de la cavalerie.
Je la renforce en envoyant un de mes escadrons disponibles attaquer
Rouves par le nord.
D. Rouves tombe
entre vos mains à 7h45. Vous voyez une cinquantaine de cyclistes en
sortir, dans la direction de Nomeny. Mais, au même instant, de
l'artillerie ennemie apparaît sur la hauteur du château de Nomeny,
et commence à tirer sur les défenseurs du mamelon ; puis, de
l'infanterie assez nombreuse, dont vous évaluez la force à un
bataillon, débouche des lisières nord de Nomeny, et se porte à
l'attaque de ce mamelon.
Vous
recevez en même temps de Mailly les deux renseignements suivants :
1° L'extrême droite de
l'armée occupe Thézey-Saint-Martin;
2° De la cote 220
(sud-ouest de Mailly), on a aperçu, entre 7h15 et 7h3o, des
fractions d'infanterie franchissant successivement le pont de Nomeny,
malgré le tir de votre artillerie.
En
outre, la reconnaissance d'officier qui a passé par Abaucourt a
trouvé, à 7 heures, Létricourt et la lisière nord du bois du
Haut-des-Trappes occupés.
Enfin,
aucune force ennemie n'a franchi, jusqu'à 7h30, la Seille à Clémery
ou à Port-sur-Seille.
Ct de la cavalerie.
Je n'attends pas d'être abordé par l'attaque montée contre le
mamelon nord de Nomeny. Je me décide à me replier, pour aller
exercer de nouveau mon action retardatrice sur une position en
arrière. Il résulte de l'examen de la carte que l'occupation du
massif forestier, bois de Mailly et de Ressaincourt, permettrait de
résister longtemps à un ennemi qui se proposerait de déborder la
droite de notre armée. II importera donc d'empêcher le plus
longtemps possible l'ennemi d'y pénétrer, puis d'y progresser et
d'en déboucher. Pour ce faire, il faudrait d'abord défendre les
lisières, et s'opposer aux progrès de l'adversaire vers le terrain
libre au nord du massif, par où il pourrait déborder l'obstacle. En
défendant la position Raucourt, Ressaincourt, et en occupant les
lisières extérieures du bois de Mailly, puis en disputant pied à
pied le terrain à l'Intérieur de ce bois, la brigade remplirait
donc sa mission.
Or,
l'infanterie ne peut atteindre Raucourt qu'à 8h45, Ressaincourt qu'à
9 heures ou 9h15, les lisières du bois de Mailly pas avant 9h3o ou
10 heures. Il faut, par conséquent, qu'en attendant l'avant-garde de
la colonne, la cavalerie fasse son possible pour empêcher l'ennemi
de prendre pied à Raucourt, Ressaincomt, bois de Mailly.
Nous
n'avons pas encore été délogés de Mailly j'y laisse un escadron,
qui se repliera par le bois de Mailly sur la route de Secourt.
Au
sud de Raucourt, terrain découvert, où il n'y a rien à faire pour
des chicanes de cavalerie contres les attaques d'infanterie et
d'artillerie de l'ennemi. Aussi, vais-je replier d'un seul coup, sans
arrêt intermédiaire, tout ce que j'ai de cavalerie dans région de
Rouves, jusqu'aux points d'appui de Raucourt et de Ressaincourt : les
deux escadrons qui ont opéré à Rouves, sur Raucourt, les deux
autres sur la cote 235 (route de Secourt, la carte indique la cote
135, ce qui est évidemment une erreur) et Ressaincourt. La batterie
d'artillerie va se reconstituer au château de Mailly, puis se
retirer par 235 sur Ressaincourt, en s'employant suivant les
circonstances.
A suivre : les commentaires de l'arbitre sur cette première partie.
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